Publisher's Synopsis
Excerpt from Revue des Deux Mondes, 1867, Vol. 62: Xxxviie Annee, Seconde Periode
Les Allemands voulaient l'unite surtout pour deux raisons, dont l'une me parait tres creuse et l'autre tres serieuse. Malheureuse ment, il faut l'avouer, la premiere a exerce et exerce peut - etre en core plus d'empire que la seconde. Cette raison, la voici. Les Alle mands se considerent comme la branche la plus pure, la plus noble de la noble race aryenne, et ils trouvent que leur pays ne fait pas dans le 'monde la figure qui convient a une si haute origine. Ils as pirent a devenir un grand etat, ayant une grande ?otte, une in nombrable armee, jouissant d'une in?uence considerable et en me sure d'acquerir beaucoup de gloire. Or il n'y a pas un seul de ces voeux qui n'aboutisse a une deception. Ce n'est pas au chiffre de la population ni a l'etendue du territoire que se mesurent le bonheur, l'eclat, les lumieres, et les etats les plus vastes sont souvent les plus dechires et les moins libres. La Judee, ce coin de cailloux bru les, comme dit Voltaire, et Athenes, cette bourgade peuplee de 20 000 hommes libres, 11 'ont - elles pas fait incomparablement plus pour la civilisation que l'empire des satrapes ou celui des cesars? Et en Allemagne meme quel foyer de vie intellectuelle que Weimar, ce duche microscopique! Quelles sources de science que gottingue, Heidelberg, Tubingue, ces grandes universites de petits etats! Exer cer de l'in?uence! Pretention inique des forts d'imposer leur vo lonte aux faibles, systeme d'intervention aussi funeste a celui qui le pratique qu'a celui qui en est la victime. Notre in?uence est compromise, s'ecrie la diplomatie avec desespoir: tant mieux, car la seule profitable a tous est celle qui resulte de l'exemple d'un bon gouvernement et d'institutions libres. Les pays ou l'experience sert a quelque chose, comme l'angleterre, commencent a le com prendre. Les petits etats sans role politique a l'exterieur sont les plus heureux, car ils n'ont a s'occuper que d'eux - memes et ne peu vent nuire aux autres. Sur la surface de notre pauvre planete toute trempee de sang et de larmes, est-il des contrees plus fortunees, plus prosperes que la Belgique et la Suisse, ces petites oasis de liberte et de paix ou les proscrits des grands empires trouvent tour a tour un asile? Une puissante ?otte de guerre! Que l'alle magne, hantee depuis 18118 par la manie d'en avoir une, considere l'union americaine, qui vend tous ses vaisseaux cuirasses a la France, au Japon, a la Russie, a tous ceux qui veulent lui en ache ter, elle qui a pourtant a proteger la marine marchande la plus considerable de l'univers. Et la gloire! Ce vain mot qui a fait tom ber tant de generations humaines sous le fer des capitaines habiles et des conquerans illustres, faut-il que la patrie de Kant se mette a poursuivre cette sanglante chimere au moment ou les autres na tions arrivent a en reconnaitre la vanite? Oui, heureux les peuples qui n'ont pas d'histoire et ceux dont les souverains ne portent pas de lauriers au front sur l'effigie de leurs monnaies! Ces aspirations que nous venons de combattre ne sont que des bouffees d'ambition malsaine, ecloses dans cette atmosphere d'idees politiques arrie rees qui a si longtemps pese sur l'allemagne. Elles se dissiperont, elles se dissipent deja devant le courant d'idees justes que le xixe siecle a le merite d'avoir vulgarisees, et qui font voir que la vraie gloire consiste a faire regner au profit de tous le bien - etre et la justice.
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