Publisher's Synopsis
Il existe, selon Max Weber, trois sources de légitimité l'autorité respectée par coutume, c'est-à-dire le pouvoir traditionnel; l'autorité inhérente à la grâce personnelle, autrement dit le pouvoir charismatique; enfin, le pouvoir légal rationnellement fondé par des statuts au sein de l'État. Le pouvoir traditionnel n'existe plus: à la fin du XVIIIe siècle, un puissant sentiment de dégoût et de décadence déstabilisa un pouvoir de droit divin millénaire mais à bout de souffle financier, politique et mystique. Un profond fossé entre le peuple et son élite à sang bleu, accusée de le parasiter, s'était irrémédiablement creusé. Les historiens de demain constateront probablement une similitude avec la situation du XXIe siècle; dans ses Mémoires d'outre-tombe, Chateaubriand notait qu'à la veille de 1789 tout était dérangé dans les esprits et dans les moeurs, symptôme d'une révolution prochaine. [...] Ce que l'on faisait, ce que l'on disait, n'était qu'une suite d'inconséquences. Dès 2012, François Hollande, avec sa boîte à outils et son embonpoint vite retrouvé, était un peu dans la situation de Louis XVI et ses serrures: il avait perdu la clef, il n'était clairement pas à la hauteur du pouvoir que lui conféraient des institutions taillées pour d'autres et il a obstinément refusé de réformer le pays, laissant à son jeune Brutus une ardoise dénoncée en termes peu amènes par la Cour des comptes en juin 2017. Avec son immature successeur, la colère, toute jaune, éclata à l'hiver 2018; colère contre le matraquage fiscal, les privilèges, le parasitisme et l'incompétence. Mais l'establishment, bien que ne disposant plus d'aucune sorte de légitimité, a cette fois verrouillé le système pour que l'État-nation sombre avec lui. C'est là tout le problème.
À l'heure d'une classe politique-spectacle intellectuellement limitée et exclusivement tournée vers la communication, autant dire que le pouvoir charismatique a lui aussi disparu. Reste donc le pouvoir légal, c'est-à-dire les solides institutions de la Ve République voulues par le général de Gaulle, mais elles sont dénaturées par le quinquennat et les pyromanes de la gauche extrême veulent les mettre à bas sous prétexte d'instaurer une VIe République qui ne serait, en vérité, que la IVe ripolinée. Les éléments sont donc réunis pour qu'une étincelle mette le feu aux poudres. Qui en sortira vainqueur ? Il n'est pas certain que ce soit, comme en 1789, la nation. Voilà pourquoi, comme pendant toute guerre - et la guerre idéologique n'est pas la moindre - il faut déjà préparer l'après-guerre et c'est ce à quoi s'emploie ce livre.