Publisher's Synopsis
Tchouang-Tseu, ne nous est guère plus connu que Lie-Tzeu. Il dut être au déclin de sa vie, vers l'an 330. Très instruit (Seuma-Ts'ien, Cheu-Ki, 1c. appendice), il passa volontairement sa vie dans l'obscurité et la pauvreté, bataillant avec verve contre les théories et les abus de son temps.L'examen du traité de Tchouang-Tseu montre à l'évidence qu'il n'a pas écrit. Il se compose d'un assemblage de notes, de fiches, recueillies par les auditeurs souvent avec des variantes et des erreurs, collationnées ensuite, brouillées et reclassées par des copistes, interpolées par des mains tendancieuses non taoïstes, si bien que, dans le texte actuel, il se trouve quelques morceaux diamétralement contraires à la doctrine certaine des auteurs. Les chapitres sont l'oeuvre de ceux qui collationnèrent les centons. Ils furent construits en réunissant ce qui se ressemblait à peu près. Plusieurs furent mis dans un désordre complet, par l'accident qui brouilla tant de vieux écrits chinois, la rupture du lien d'une liasse de lattes, et le mélange de celles-ci.Lie-Tzeu et Tchouang-Tseu développent Lao-Tseu, et prétendent faire remonter ses idées à l'empereur Hoang-Ti, le fondateur de l'empire chinois. Ces idées sont, à très peu près, celles de l'Inde de la période contemporaine, l'âge des Upanishad. Un panthéisme réaliste, pas idéaliste. - Au commencement fut seul un être, non intelligent mais loi fatale, non spirituel mais matériel, imperceptible à force de ténuité, d'abord immobile, Tao le Principe, car tout dériva de lui. Un jour ce Principe se mit à émettre Tei sa Vertu, laquelle agissant en deux modes alternatifs Yinn et Yang, produisit comme par condensation le ciel, la terre et l'air entre deux, agents inintelligents de la production de tous les êtres sensibles. Ces êtres sensibles vont et viennent au fil d'une évolution circulaire, naissance, croissance, décroissance, mort, renaissance, et ainsi de suite. Le Souverain d'en haut des Annales et des Odes, n'est pas nié expressément, mais dégradé, annulé, si bien qu'il est nié équivalemment. L'homme n'a pas une origine autre que la foule des êtres. Il est plus réussi que les autres, voilà tout. Et cela, pour cette fois seulement. Après sa mort, il rentre dans une nouvelle existence quelconque, pas nécessairement humaine, même pas nécessairement animale ou végétale. Transformisme, dans le sens le plus large du mot. - Le Sage fait durer sa vie, par la tempérance, la paix mentale, l'abstention de tout ce qui fatigue ou use. C'est pour cela qu'il se tient dans la retraite et l'obscurité. S'il en est tiré de force, il gouverne et administre d'après les mêmes principes, sans se fatiguer ni s'user, faisant le moins possible, si possible ne faisant rien du tout, afin de ne pas gêner la rotation de la roue cosmique, l'évolution universelle. Apathie par l'abstraction. Tout regarder, de si haut, de si loin, que tout apparaisse comme fondu en un, qu'il n'y ait plus de détails, d'individus, et par suite plus d'intérêt, plus de passion. Surtout pas de système, de règle, d'art, de morale. Il n'y a, ni bien ni mal, ni sanction. Suivre les instincts de sa nature. Laisser aller le monde au jour le jour. Évoluer avec le grand tout.Reste à noter les points suivants, pour la juste intelligence du contenu de ce volume.Beaucoup de caractères employés par les anciens taoïstes, sont pris dans leur sens primitif étymologique; sens tombé en désuétude, Aucun des faits allégués par Lie-Tzeu et surtout par Tchouang-Tseu, n'a de valeur historique. Les hommes qu'ils nomment, ne sont pas plus réels, que les abstractions personnifiées qu'ils mettent en scène. Ce sont procédés oratoires, rien de plus. Il faut surtout se garder de prendre pour réelles, les assertions de Confucius, toutes inventées à plaisir. Certains auteurs mal avertis, sont jadis tombés dans cette erreur, et ont de bonne fo