Publisher's Synopsis
" La place de l'épicuréisme dans l'histoire de l'esprit humain est considérable et hors de toute proportion avec le génie de l'auteur même du système. Épicure, - les anciens l'avaient déjà remarqué, - n'est pas original. Sa physique, on le sait, il l'emprunte presque tout entière à Démocrite, et, pour ce qu'il y ajoute, il la gâte plutôt qu'il ne l'améliore. Sa morale, on le sait également, avait été esquissée dans ses traits principaux par les cyrénaïques et les sophistes. Ce qui fait l'intérêt durable de sa philosophie ne lui appartient pas. Qu'est-ce donc qui explique le prestige du nom d'Epicure, et fait qu'une doctrine, déjà constituée avant lui dans ce qu'elle a d'essentiel, est et sera toujours dans l'histoire l'épicuréisme ? Il me paraît qu'on en peut donner plusieurs raisons. La première, et la moins importante, c'est peut-être qu'Épicure crut et sut faire croire à ses disciples qu'aucun philosophe digne de ce nom n'avait paru avant lui, qu'il avait apporté le premier et à jamais toute la vérité et les seules conditions du salut. Cette raison peut sembler bien faible; la postérité, dira-t-on, n'a pas l'habitude de prendre ainsi de confiance les gens pour ce qu'ils se donnent; elle n'accepte pas sans bénéfice d'inventaire les apothéoses organisées par des adeptes enthousiastes; elle met chacun à sa vraie place. - Oui, presque toujours, mais pas toujours. Il n'est pas entièrement inutile, même devant l'histoire, de se vanter beaucoup, et d'avoir des gens qui vous vantent, surtout si, parmi ces panégyristes, il se trouve un poète de l'âme et du génie de Lucrèce: il en reste toujours quelque chose. Pour exciter de telles admirations, pour avoir une telle idée de soi-même et de son oeuvre, ne faut-il pas qu'on soit un bien grand homme ?..."