Publisher's Synopsis
LA CUCARACHA[A]. Aï que me piqua, Aï que me araña, Con sus patitas La Cucaracha. Chant populaire espagnol. [A] Prononcez.-Coucaratcha. Vers la fin de la guerre d'Espagne, je me trouvais à Chiclana, charmant village peu éloigné de Cadix, et renommé par l'efficacité de ses sources minérales;-on m'avait conseillé ces eaux pour parfaire la guérison d'une blessure assez dangereuse, et mon excellent hôte don Andrès d'Arhan, en m'entourant de tous les soins attentifs d'une amitié délicate, me rendait presque ingrat envers la France, car en vérité, j'avais honte de me trouver aussi heureux au fond de l'Andalousie. On jugera de l'esprit et de l'âme de don Andrès, quand on saura que lui témoignant un jour toute ma reconnaissance pour sa sollicitude si bienveillante et si paternelle; je lui demandais pourtant ce qui me l'avait gagnée?-Il ne me répondit que ces mots: -J'ai un fils de votre âge qui voyage en France..... Et l'on me pardonnera ces détails tous personnels, si l'on songe que le seul bonheur pur et vrai, que goûte peut-être l'écrivain, est le plaisir de retracer le nom d'un ami, -une date précieuse pour son coeur, -un doux souvenir, -dans l'espoir presque toujours insensé-qu'après lui, ce nom, cette date, ce souvenir, vivront encore un peu. Un soir donc, un beau soir d'été, assis sous un magnifique berceau d'orangers, fumant de légitimes cigares réales, buvant à petits coups une délicieuse agria glacée, nous étions don Andrès, moi et quelques amis, plongés dans une extase silencieuse, jouissant de la fraîcheur de la nuit, du parfum des orangers, et de cet état de torpeur si inappréciable dans les pays chauds. Lorsque tout à coup, des castagnettes résonnent; une guitare prélude et une voix jeune, suave, mais un peu traînante se met à chanter un boléro... puis deux, puis trois... enfin une espèce de frénésie musicale et chantante semble s'emparer de l'invisible Orphée: les airs, les paroles se pressent, se succèdent avec une merveilleuse rapidité, et finissent par devenir presque inintelligibles. -Dieu me sauve, c'est la Juana, -dit don Andrès. La Juana était une paysanne dont le père était fermier de don Andrès;-une belle jeune fille, brune, grande, svelte, véritable type d'Andalousie. Marie-Joseph Sue dit Eugène Sue, né le 26 janvier 1804 à Paris et mort en exil le 3 août 1857 à Annecy-le-Vieux (Duché de Savoie), est un écrivain français. Il est principalement connu pour deux de ses romans-feuilletons à caractère social: Les Mystères de Paris (1842-1843) et Le Juif errant (1844-1845). Jeunesse Son père, Jean-Joseph Sue (1760-1830), (fils), était chevalier héréditaire par lettres patentes du 17 février 1815 (issu d'une lignée de chirurgiens parisiens originaire de Provence). Après avoir été chirurgien de la Garde impériale de Napoléon 1er, puis médecin chef de la maison militaire du roi, il était professeur d'anatomie et médecin consultant du roi lui-même. La marraine d'Eugène n'était autre que Joséphine et son parrain Eugène de Beauharnais. Eugène étudie au lycée Condorcet. Il se révèle être un élève médiocre et turbulent, puis un jeune homme dont les frasques défraient la chronique. En 1821, il abandonne le lycée en classe de rhétorique et grâce à son père est admis sans difficulté comme stagiaire à la Maison militaire du roi. Après deux ans d'apprentissage il est affecté en 1823 aux hôpitaux de la 11e division militaire de Bayonne. La même année, il soigne les blessés de la prise de Trocadéro. Il s'ensuit une occupation du territoire espagnol et son affectation à l'hôpital militaire de Cadix. Il y demeure jusqu'en 1825. C'est là qu'il écrit sa première oeuvre: un A-propos dramatique sur le sacre de Charles X. Il a même l'honneur de le voir représenter une fois devant les notables de la ville.